Quand s’isoler, c’est poser un geste de solidarité…

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« Nous sommes en guerre », a martelé à six reprises le président français Macron, lundi 16 mars. Pas de guerre sans ennemi. Mais ici l’ennemi semble invisible. Et si l’ennemi de cette crise sanitaire n’était pas tant le coronavirus que nous-mêmes ? Nous avions tendance à oublier que notre condition humaine est à la fois fragile et mortelle. Nous sommes vulnérables.

Après les attentats terroristes, la reprise de notre vie normale était un acte de résistance et de résilience. Aujourd’hui, se recentrer sur sa cellule familiale n’est pas un réflexe égoïste mais la seule façon de prendre soin d’autrui.

Le virus qui nous fait peur nous rappelle que nous formons tous une société, une communauté dans laquelle chacun vit aussi par et pour les autres. C’est pourquoi nous devons nous comporter comme si nous étions, tous, contaminés, afin que tous nos gestes soient orientés vers la sauvegarde de ceux et celles qui nous entourent. S’isoler, c’est donc poser un geste de solidarité. Dès que nous avons compris que la séparation et l’isolement sont liés à la solidarité, leur signification est autre. Leur signification est positive. Pour tous et pour toutes, le civisme est la seule ligne de conduite. Ici, les chrétiens ne sont en rien différents des autres citoyens.

Le chrétien vit (essaie de vivre) tout cela en lien avec le Christ. Pâques nous rappelle que le Christ est infiniment plus qu’un modèle, un beau personnage d’un passé lointain. Il vit ! Il nous appelle à nous aimer, à pardonner, à partager…

Le Christ vivant vient à notre secours. Á une condition – car Il respecte notre liberté – : que nous L’acceptions comme la force et le guide de notre vie. Dans l’évangile selon saint Jean, nous lisons : « Demeurez en moi, comme je demeure en vous ! De même que le sarment, s’il ne de- meure sur la vigne ne peut de lui-même produire du fruit, ainsi vous non plus si vous ne demeurez en moi. » (Jean 15, 4). La foi chrétienne est donc d’ordre relationnel. Le chrétien, souvent en trébuchant, essaie de vivre la parole de saint Paul dans son épître aux chrétiens en Galatie : « Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi. » (Galates 2, 20).     Il y a le lien d’amitié entre le Christ vivant et moi et en Lui avec tous les autres qui, en Lui, sont mes frères et sœurs à respecter et à aimer.

Voici quelques suggestions pour vivre notre vie quotidienne non pas comme un confinement mais comme un élargissement de notre cœur qui peut davantage s’ouvrir vers Dieu et vers notre prochain.

  • Maintenant que nous ne pouvons plus nous rendre à l’église, même pas pour Pâques, vivons en communion avec tous les chrétiens dans le monde qui n’ont pas accès facilement à la Table du Seigneur. Unissons-nous à eux par les eucharisties diffusées par la radio et la télévision.
  • Pourquoi ne pas créer un coin de prière dans sa maison, studio ou appartement, pour soi ou pour toute la famille ?
  • Si l’Église est bien l’endroit où Dieu est chez Lui, où Il est respecté et aimé, la famille en est la plus petite cellule. Jésus n’a-t-Il pas dit : « Là où deux ou trois se trouvent réunis en mon nom, je suis au milieu d‘eux. » ? (Mt 18, 20). Ce temps spécial peut être l’occasion de prier ensemble, d’inventer un petit rituel pour laisser Dieu prendre davantage sa place au cœur du foyer.
  • Prenons des nouvelles des personnes plus sensibles à la maladie. Faisons leurs courses. Demandons ce dont elles ont besoin. N’oublions pas les familles des militaires (et eux-mêmes) qui sont en mission à l’étranger (ou en quarantaine). Un coup de téléphone, un petit mot écrit, ne transmet aucun virus mais seulement de l’attention aimante. N’oublions pas nos collègues qui vivent seuls ou qui traversent une période difficile.
  • Portons une attention particulière aux personnes qui vivent un deuil. Dans ces circonstances très spéciales, la séparation peut être encore plus difficile si une quarantaine ou des restrictions de célébration empêchent de vivre la proximité.
  • Pour ceux et celles qui vivent, avec d’autres, dans des surfaces réduites, l’ambiance peut devenir lourde. Alors chacun doit faire un petit effort pour ne pas se rendre vraiment insupportable. Face à l’agaçant, face à l’insupportable, pratiquons la mise en quarantaine mentale du « point chaud ». Évitons l’obsessionnel afin d’éviter la nervosité exacerbée. Et sachons que la compréhension et le pardon sont essentiels à chaque relation.
  • Arrêtons (s’il le faut) de passer la journée à écouter ce qui se passe, à scruter les chiffres de la contagion et de la mortalité. Cela peut devenir anxiogène. Pour ne pas nous laisser happer par les informations, donnons-nous un cadre pour les écrans. Éteignons une part de la journée tous les écrans. Gardons la tête froide : nous constatons que le confinement porte ses fruits.
  • Fixons, seul ou en famille, les horaires des repas, du travail, de la lecture… Il faut se donner des rites et des cadres. Qui se donne ainsi un emploi du temps est beaucoup plus libre car « être libre, c’est obéir à la loi que l’on s’est prescrite », rappelle Rousseau.
  • Sachons que, dans cette épreuve, Dieu n’attend pas de nous des bondieuseries farfelues et affolées. Accomplissons notre devoir.

Ce que nous vivons n’est pas un châtiment divin. Il s’agit plutôt d’un basculement de civilisation. Nous sommes devant un avertissement historique. Humainement et économiquement cette crise sanitaire peut être un révélateur et un accélérateur. Nous devrons, nous le devons déjà maintenant, réviser nos priorités dans le domaine de la santé, de l’écologie, de l’économie,…

En tant que chrétiens osons nous en remettre à Dieu. Que le calme et la confiance soient notre force (cfr. Isaïe 30, 15). Le temps est venu de joindre nos mains, afin de prier pour ceux et celles qui souffrent et qui meurent. Demandons la force pour ceux qui s’en occupent. Que Dieu éclaire et protège tous ceux et celles qui se battent contre ce fléau.

Courage et espérance !

Padre Robrecht Boone  

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