Homélie de Pâques du Cardinal De Kesel

Vigile pascal 08-04-2023 Cathédrale Bruxelles

Pâques 09-04-2023 Cathédrale Malines

Chers frères et sœurs,

Pâques est la fête de la joie et de l’espérance. Les Apôtres n’ont pas gardé cette joie pour eux. C’est la raison d’être de l’Eglise jusqu’à ce jour : témoigner de cette joie.

Témoigner de Dieu qui n’abandonne pas sa création. Dieu, Créateur et Sauveur,  qui n’abandonne personne et qui est bien décidé de mener à bien ce qu’Il a commencé.

Jésus est passé en faisant le bien. Il a montré, et souvent de manière surprenante, qui est Dieu et ce que cela peut signifier pour l’homme de Le rencontrer. Il a touché le cœur de beaucoup, par sa bonté, son humanité, son amour. Mais surtout par son attention pour ceux qui ne comptent pas, sont reniés ou même méprisés. Personne ne se sentait exclu par Lui. C’est pour cette raison qu’Il est devenu lui-même l’un d’entre eux, victime de l’injustice, de l’abus de pouvoir et de la violence, condamné à mort et pendu au bois de la honte.

C’est alors que l’incroyable s’est produit. Ceux qui ont tant partagé avec Lui, ses disciples L’ont vu, reconnu, rencontré. D’abord l’incertitude, le doute et puis une expérience bouleversante : c’est Lui ! le Vivant ! De cette foi est née l’Eglise. Le pouvoir et la force qui l’ont mis à mort, n’ont pas le dernier mot. Rien ne peut nous séparer de l’amour de Dieu qui est plus fort que tout ce qui résiste à Lui et à sa bonté.

Il ne peut en être autrement : s’il est vrai que le Christ a brisé le pouvoir du mal et de la mort, Pâques est alors source d’espérance et de joie. Mais non pas d’une euphorie, aveugle devant l’injustice et la violence qui sont effectivement présentes, comme si la mort n’existait plus, comme si la foi en la résurrection pouvait être réduite à la question de savoir si l’au-delà existe oui ou non. Comme si cela n’avait rien à voir avec ce qui se passe sur la terre et avec nous. Comment pourrions-nous nous réjouir de la victoire sur la mort si nous ne nous opposions pas à tout ce qui conduit à la mort, à tout ce pourquoi nous causons la mort les uns aux autres, si nous ne nous opposions pas à toute forme de guerre et de violence, à toutes folies de grandeur et d’abus de pouvoir, à toute exclusion de qui que ce soit.

C’est pour cette raison que Pâques est également la fête de la paix. C’est frappant dans les récits évangéliques : lorsque les disciples rencontrent le Ressuscité, sa première parole est chaque fois un souhait de paix : « la paix soit avec vous ». C’est le premier mot qui Lui vient sur les lèvres. C’était aussi une de ses premières paroles lorsqu’il a commencé sa prédication en Galilée : « Heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu ». Et dans le récit de la passion on l’entend dire : « Tous ceux qui prennent l’épée périront par l’épée. »

Il est tellement important et urgent de comprendre que c’est justement à Pâques que ce souhait de paix nous est adressé, à nous, à toutes les Eglises et au monde entier. Tellement important de laisser ce souhait de paix pénétrer au plus profond de notre cœur. Car aujourd’hui encore on prend l’épée et ils deviennent de plus en plus nombreux ceux qui périssent par l’épée. Pas seulement en Ukraine, mais aussi en Syrie, à l’Est du Congo et bien ailleurs. Il y a encore tellement de misère causée par l’exploitation et la pauvreté malgré tous les progrès scientifiques et techniques. Tant de gens sur les routes de l’exil en quête d’une vie meilleure et plus digne, qui ne trouvent pas de place à l’auberge. Tant de personnes qui ne comptent pour rien, qui ne sont pas respectées ni comprises, des hommes, des femmes et des enfants dont on a à peine, voire même plus du tout, conscience qu’ils sont des êtres humains.

La résurrection ne commence pas seulement après la mort mais bien depuis le jour de notre baptême. Car telle est la vie d’un chrétien : être tellement uni au Christ, vivre tellement de son amour et de sa paix que la mort n’a plus d’emprise sur nous. Pâques nous invite à dire non à la guerre et la violence et oui à la paix et à la réconciliation, non à la haine et à la discrimination et oui à l’amour et à la solidarité, non au repli anxieux sur soi-même et oui à l’ouverture et à l’hospitalité. Pâques nous invite à continuer d’agir avec tous les hommes de bonne volonté en faveur d’une société humaine digne de ce nom.

L’Eglise nous demande à Pâques de renouveler nos promesses de baptême. On demande à chacun de nous si nous sommes chrétiens et si nous voulons vivre en chrétiens. Répondons oui de tout notre cœur. Car telle est notre mission face à tous les défis devant lesquels nous nous trouvons, y compris dans l’Eglise : en toute simplicité et sans nous estimer meilleurs que les autres, être des disciples du Christ, des chrétiens dignes de ce nom. En étant ainsi aussi des citoyens responsables dans la société. 

Je vous souhaite à tous une fête de Pâques pleine d’espérance et de paix. Amen.

+Jozef Cardinal De Kesel

Archevêque de Malines-Bruxelles

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