Numéro 4.

Dans les lectures proposées tant dans l’Ancien que dans le Nouveau Testament, le concept d’attente messianique est central. Et durant cette période de l’Avent, nous parlons aussi très clairement de grandir dans l’attente de la venue du sauveur, du Messie.  C’est le temps de la patience, de la transition vers la lumière.  En un mot l’espoir.

                L’Avent n’est pas seulement un rappel historique de ce qui s’est passé il y a vingt siècles. C’est aussi rendre réel le fait que cet événement nous arrive aujourd’hui encore.  Nous aussi nous attendons que le rédempteur entre dans nos vies.  Il existe un pont entre le passé, ce que nous vivons aujourd’hui au plus profond de nous-mêmes, et ce qui se passera dans le futur.  Comme l’a écrit un collègue : « nous sommes inclus dans l’unique histoire infinie et universelle de Dieu avec l’homme et avec Jésus comme centre ».

                Mais qu’est-ce que cela signifie dans ma vie personnelle ?  Que signifie « attendre » ? Que signifie l’espoir dans mon job de soldat, de mère, de père ?  Qu’est-ce que ce message de Noël, d’espoir a à me dire lorsque je suis confronté à une souffrance personnelle, lorsque mon conjoint ou mon enfant est gravement malade ou déraille ? Qu’est-ce que l’espoir ?

                Du 28 novembre au 6 décembre, les Juifs ont célébré l’ Hanoukka.  Cette fête trouve son origine à l’époque grecque, lorsque l’ancienne Israël était envahie par un nouvel occupant qui avait imposé aux Juifs toutes sortes de restrictions et avait profané le temple.  Excédés les Juifs n’en purent plus et se révoltèrent (ndlr la révolte des Maccabées).  Le Temple fut repris et purifié, mais il n’y avait pas assez d’huile pour allumer le candélabre du Temple.  Un miracle se produisit.  Le candélabre a continué à brûler pendant huit jours.  Lors de la célébration actuelle de l’ Hanoukka, les bougies de ce candélabre sont allumées jour après jour dans le salon juif. De cette manière, les Juifs ne se contentent pas de célébrer un événement passé, mais rappellent également à ne jamais abandonner et à toujours espérer.

                Un rabbin juif a raconté un jour cette histoire d’espoir : « J’ai appris cette leçon de confiance et d’espoir non pas dans des cours de théologie, mais dans un misérable camp de concentration de Silésie, en Allemagne, portant le nom grotesque de Lieberose (rose douce). C’était un hiver froid de 1944. Bien que nous n’ayons rien qui ressemble à un calendrier, mon père, qui était mon codétenu là-bas, nous a emmenés, quelques amis et moi, dans un coin de notre baraque. Il a dit que c’était la veille de l’ Hanoukka.  Il a sorti un bol de forme particulière et a commencé à allumer un tissu très enroulé, il allait devenir notre bougie. Le tissu était imbibé de sa précieuse ration de margarine. Avant qu’il ne puisse dire la bénédiction, j’ai protesté contre ce gaspillage de nourriture. Il m’a regardé, puis a regardé la bougie fabriquée à la maison et m’a dit : « toi et moi avons remarqué que tu peux vivre pendant trois semaines sans nourriture.  Une fois, nous avons également vécu sans eau pendant près de trois jours. Mais on ne peut vraiment pas vivre trois minutes sans espoir. » »

                Les chrétiens qui ont vécu dans le berceau du christianisme pendant des siècles sont de nos jours inlassablement persécutés et ne constituent plus qu’une petite minorité.  Dans des pays comme l’Irak et la Syrie, beaucoup fuient la violence et craignent pour leur vie.

                Sarah de Bagdad parle de son père Rabbi Polus.  Il a été retrouvé mort un jour devant la porte d’entrée dans une mare de sang. C’était terrible. Le père de Sarah était professeur d’anglais et d’histoire dans un collège de Bagdad.  Il était également diacre dans l’église locale et enseignait aux enfants de la paroisse. Il leur a appris à lire et à écrire l’araméen, la langue de notre foi chrétienne, et a donc été appelé Rabbi.  Il a parfois aussi été interprète pour les Américains pendant la guerre du Golfe, ce qui lui a valu d’être tué. Pour garder vivante la mémoire de son père, Sarah continue de se consacrer aux enfants de la paroisse.  Elle leur raconte des histoires, les laisse dessiner et jouer.

                Toujours au Kurdistan irakien, le père Jens Petzhold s’engage auprès des habitants de sa paroisse. Il rassemble les musulmans et les chrétiens et ainsi contribue à rendre le monde meilleur. Sarah et le Père Jens donnent de l’espoir à ceux qui n’en ont pas.

                Nous avons également besoin d’espoir plus près de chez nous.  Le titre « Numéro 4 » ne fait pas référence au quatrième dimanche de l’Avent.  Il ne fait pas référence non plus à la quatrième bougie de la couronne. Ecoutez plutôt ceci : « Il y a quelques semaines, quelqu’un m’a demandé d’apporter un objet qui pourrait symboliser notre famille.  Le numéro de notre maison semblait correspondre parfaitement au projet.  Le fameux numéro 4, celui-là même attaché près de la porte d’entrée, celui où l’on peut être chez soi.  Une maison dans laquelle nous avons le droit d’essayer, nous avons le droit de tomber mais surtout l’endroit où nous trouvons de l’aide pour nous relever.  Une maison où nous pouvons savoir que nous sommes aimés, malgré nos imperfections et nos erreurs ».

                A la lumière de ceci, je souhaite également que dans votre cercle familial, vous vous donniez mutuellement de l’espoir.  Cela ne doit pas nécessairement se faire sous la forme de grandes actions, mais sous la forme de petites actions par lesquelles nous nous donnons mutuellement de l’espoir et nous nous aidons mutuellement à reprendre la route. L’espoir, c’est croire qu’un nouvel avenir est possible parce que vous vous sentez aimé.

                Je voudrais encourager les militaires et particulièrement ceux qui sont parents.  Gardez le cap, continuez à aimer, regardez le numéro de votre maison de temps en temps.  Est-il toujours là ?  Est-ce qu’il pend de travers et dois-je le redresser ? Faites-le, n’attendez pas l’année prochaine.

                Allumez une bougie de semaine en semaine pour qu’il fasse un peu moins sombre en vous et tout autour de vous. Passez un joyeux Avent !

Padre Luc Carré

Avec remerciements à Laurent Segers pour la relecture et la correction de la version française!

Leave a Reply

You can use these HTML tags

<a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>