» Décider dans l’incertitude » par le Général Vincent Desportes. Coll. Stratégies & Doctrine, Ed. Economica, Paris, 2004, 199 pages.
108/2008
Le Gén Desportes entraîne le lecteur sur un chemin de réflexion, parlant de l’acte de décision dans un contexte stratégique.
Il décrit le responsable militaire toujours confronté à la complexité du réel. Malgré les progrès technologiques et la collecte des renseignements, celui-ci doit accepter d’être confronté à l’instabilité des situations. Ses décisions devront tenir compte d’une certaine dose d’incertitudes.
La guerre est imprévisible car chaque adversaire vient avec sa propre complexité et n’offre pas toujours la réaction attendue par l’autre. De plus, les aléas liés aux situations interfèrent également. Avec les exemples de l’Histoire du passé mais aussi de ces dernières années lors de la guerre en Iraq, l’auteur explicite combien le climat d’incertitude trouve son origine dans le fait que l’on travaille avec de l’humain, du vivant et que l’on dépend pour une part de la liberté de l’adversaire pour conserver sa liberté d’action. L’environnement également intervient dans une certaine ‘non maîtrise’. Le chef devra en tenir compte et limiter tant que faire se peut la part de hasard inhérent à toute réalité et action humaine.
Dans une seconde partie, Vincent Desportes expose sa vision de l’incertitude que le commandement doit intégrer dans son fonctionnement et ses prises de décisions. Il offre au lecteur une série d’exemples concrets. Il aborde la difficulté de l’imperfection du renseignement pourtant si nécessaire. Il rappelle que c’est une utopie que de croire en une vision parfaite de la réalité. Prenant le point de vue des deux camps opposés, parfois même en intégrant l’aspect du terrorisme, il brosse les traits d’une gestion de la décision, dans la planification, dans le contenu des ordres, dans leur mise en œuvre. Il appelle à la simplicité des ordres donnés, à la liberté d’initiative des subordonnés, et à la réserve de moyens disponibles pour répondre à la stratégie de l’ennemi.
S’appuyant sur une conception de Moltke concernant l’initiative laissée au subordonné encadré toutefois par les ordres, il rappelle que celui-ci est le premier confronté à l’imprévisible. Il doit pouvoir réagir d’initiative. Il insiste donc sur l’équilibre indispensable entre l’ordre donné et la latitude d’action laissée au subordonné. Reprenant à nouveau des exemples récents, il vante les mérites d’un commandement qui cultive l’adaptation, la décentralisation, la subsidiarité et la confiance entre les différents partenaires d’un objectif militaire. Mais cela se prépare déjà sur le pied de paix en cultivant une souplesse des esprits, un sens de l’initiative, une prise de risques calculés ainsi que bien des valeurs nécessaires à tout soldat.
Enfin, il conclut en faisant le pari d’une incertitude utile pour désarçonner également l’ennemi.
Un livre qui pourra inspirer aussi bien les décideurs militaires que civils.
L’incertitude fait partie de nos champs de vie à tous. Nos décisions doivent toujours en tenir compte.
D. Chaboteau